mercredi 13 octobre 2010

La carte et le territoire

La carte et le territoire est le nouveau roman de Michel Houellebecq, sélectionné pour le second tour du fabuleux prix Goncourt 2010.

Présentation de l'éditeur :
Si Jed Martin, le personnage principal de ce roman, devait vous en raconter l'histoire, il commencerait peut-être par vous parler d'une panne de chauffe-eau, un certain 15 décembre. Ou de son père, architecte connu et engagé, avec qui il passa seul de nombreux réveillons de Noël.
Il évoquerait certainement Olga, une très jolie Russe rencontrée au début de sa carrière, lors d'une première exposition de son travail photographique à partir de cartes routières Michelin. C'était avant que le succès mondial n'arrive avec la série des « métiers », ces portraits de personnalités de tous milieux (dont l'écrivain Michel Houellebecq), saisis dans l'exercice de leur profession.
Il devrait dire aussi comment il aida le commissaire Jasselin à élucider une atroce affaire criminelle, dont la terrifiante mise en scène marqua durablement les équipes de police.
Sur la fin de sa vie il accédera à une certaine sérénité, et n'émettra plus que des murmures.
L'art, l'argent, l'amour, le rapport au père, la mort, le travail, la France devenue un paradis touristique sont quelques-uns des thèmes de ce roman, résolument classique et ouvertement moderne.

Alors que certains décrivent ce dernier roman de Michel Houellebecq comme un texte spécialement écrit pour le Goncourt, je trouve quant à moi que La carte et le territoire est le roman le plus personnel de l'auteur, et peut-être même le plus touchant. Piégé dans la peau de son propre personnage, Houellebecq tente une approche sur une pré autobiographie dans laquelle il dépeint ses craintes futures.
En effet, tantôt placé sur un piédestal, tantôt ridiculisé et comparé à une sorte de légume, Houellebecq semble parfois s'offrir une séance d'auto-psychanalyse. Alors, allongez-vous sur votre canapé, bien à l'aise, et laissez vous porter par la voix d'un auteur hors du temps et hors de notre monde social.

Les insectes et les hommes, d'autres animaux aussi, semblent poursuivre un but, leurs déplacements sont rapides et orientés, alors que les fleurs demeurent dans la lumière, éblouissantes et fixes.

Loin des passages crus de ses autres romans, son nouveau texte est plus posé mais offre avec toujours autant de génie une force stylistique rare. Le roman a quelque chose de captivant malgré le manque d'intrigue. A l'évidence, l'auteur ne joue pas sur cette carte pour s'emparer de son lecteur mais il paraît faire montre de franchise et de sincérité en s'autocritiquant dans un récit autobiographique façon 'miroir' où son reflet est le témoin de sa triste vie.
Jed Martin est ce témoin. Il est également le personnage principal. Véritable fortuné grâce à son don artistique, Jed n'en est pourtant que pauvre d'un point de vue social. Mis à part sa torride relation avec Olga, ses aventures se font rares et son carnet d'adresse ne semble pas bien fourni. Il y a fort à croire que Jed est ce reflet littéraire de l'auteur par lequel ce dernier laisse passer une partie de ses fantasmes.
Le récit se transforme alors en un discours schizophrène dans lequel chacun des personnages a son rôle à jouer autour du noyau central ; Jed.

et jusqu'à l'outing de Jean-Pierre Pernaut, tout concourait à ce fait sociologique nouveau : pour la première fois en réalité en France depuis Jean-Jacques Rousseau, la campagne était redevenue tendance.

La carte et le territoire est un roman d'anticipation proposant humour et aveux. Houellebecq décrit sa vie future, aussi triste et dépressive que ce que renvoie l'image de l'auteur à l'heure actuelle. La relation entre Jed Martin et Houellebecq, le personnage, évolue tout au long du roman pour offrir au lecteur une connexion d'une puissance surprenante. Le regard du plus jeune envers son aîné va transformer ce lien en un véritable fanatisme artistique qui permettra à l'auteur de laisser sa marque sur le monde avant de mourir.
La carte et le territoire est bien plus qu'un simple cantique narcissique dans le but de nourrir les feuilles blanches des critiques toujours friands de satiriser l'auteur, c'est une œuvre profondément originale qui révèle les plus grandes peurs de celui-ci. L'une d'entre elle est de devenir sénile. Il met d'ailleurs tout en œuvre, aussi violent que cela puisse être, pour supprimer toute éventualité de devenir le vieillard de ses cauchemars.
Un roman bouleversant.

Aucun commentaire: